L’huile de poisson est quasiment la seule source d’acides gras oméga 3 à très longue chaîne appelés EPA et DHA. EPA pour acide éicosapentaénoïque ; DHA pour acide docohexaénoïque. À quoi servent-ils ? Les acides gras polyinsaturés sont de deux types : oméga 6 et oméga 3.
Les mammifères, chien ou chat, ne savent pas les fabriquer. Mais ils sont essentiels à la vie : donc ils doivent les trouver dans leur alimentation. Les oméga 6 : le premier de la série est l’acide alpha-linoléique. Les oméga 3 : le premier de la série est l’acide linolénique.
À partir de ces acides gras, oméga 6 comme oméga 3, diverses enzymes (élongases et désaturases) agissent successivement qui permettent la synthèse de nouveaux acides gras (sans jamais passer d’une série à l’autre). Parmi les acides gras dérivés de ces “chefs de file”, on en trouve de très importants, en particulier l’acide arachidonique pour les oméga 6 ; l’acide gamma-linolénique et aussi EPA et DHA, pour la série oméga 3.
Le problème : chiens et surtout chats ne synthétisent pas les omega 6 et 3, et pas toujours en quantité suffisante les dérivés à chaîne très longue, même si les chefs de file sont présents dans l’alimentation, ils faut donc parfois les apporter aussi dans l’alimentation.
Les acides gras polyinsaturés, en général, ont des rôles essentiels dans l’organisme
- immunité,
- cicatrisation,
- reproduction (viabilité des chatons, qualité du sperme),
- croissance,
- qualité protectrice de la peau,
- brillant des poils,
- cognition et apprentissage du jeune,
- agrégation plaquettaire (coagulation),
- vasomotricité et vasoconstriction,
- inflammation
Pour plusieurs de ces fonctions, les molécules dérivées des oméga 6 agissent dans un sens (par exemple ils sont plutôt vasoconstricteurs et pro-inflammatoires) et celles dérivées des oméga 3 agissent dans l’autre sens (par exemple ils sont plutôt vasodilatateurs et anti-inflammatoires).
Ainsi, comme il y a les deux dans l’alimentation, il y a un équilibre dans l’organisme.
À certains stades de la vie, il semble que l’apport direct d’oméga 3 à très longue chaîne, très insaturés, soit bénéfique (chez le jeune lors du développement du cerveau, donc chez la femelle gestante et allaitante et chez le jeune en croissance) (Heinemann, J.Nutr, 2005), alors qu’il est peu utile (ou nécessaire seulement à très petite dose) chez l’adulte en bonne santé.
Dans certaines circonstances, apporter plus d’oméga 3 que le seul besoin physiologique permet de lutter contre des effets excessifs des oméga 6 ou d’effets induits par une pathologie.
L’huile de poisson est riche en EPA et DHA, oméga 3 à chaîne longue à rôle fort en situation pathologique.
Ces acides gras ne sont pas essentiels mais peuvent constituer une contre-mesure à l’acide arachidonique, et à certains dérèglements de l’organisme.
En situation pathologique, au delà de la couverture du besoin nutritionnel en oméga 3, EPA et DHA sont directement EFFICACES, ce qui n’est pas le cas de l’acide linolénique, qui reste pourtant essentiel à l’organisme.
En pratique, on doit toujours apporter les acides gras essentiels (acide alpha-linoléique -et acide arachidonique chez le chat-, oméga 6 et acide linolénique, oméga 3).
Mais EN PLUS, selon les circonstances on peut devoir ajouter EPA et DHA, omega 3 à chaîne très longue.
Dans quelles situations pathologiques peut-on faire appel aux oméga 3, et en particulier à EPA et DHA ?
De manière certaine chez les carnivores dans les cas suivants :
- Insuffisance rénale chronique (Plantinga et al., Vet Rec 2005 ; Brown SA et al., Vet Clin 1996).
- Arthrose (Hanse et al., J Nutr. Biochem. 2008 ; Fritsch et al., J Vet Intern Med. 2010 ; Fritsch et al., JAVMA 2010 ; Corbee et al., JAPAN, in press)
- Atopie (Bensignor et al., Vet Derm. 2008)
- Trouble cardiaque (fibrillation atriale ; Sakabe et al., Circulation, 2007)
De manière plus hypothétique (pas encore beaucoup d’éléments de preuve ou preuves dans d’autres espèces mais pas chez le chien ou le chat)… dans le cas de cancer ou de maladie.
Comment et Combien en apporter ?
Les huiles de poisson des mers froides (sardine, hareng, maquereau, saumon) sont riches en EPA et DHA.
Selon la composition de l’huile apportée, ce qui compte, ce sont les acides gras EPA+DHA…
Attention, l’huile de foie de morue contient aussi beaucoup d’EPA et DHA, mais aussi une énorme quantité de vitamines A et D, vitamines certes essentielles, mais aussi toxiques en excès, il faut donc l’éviter.
Plus les acides gras sont insaturés, plus ils sont sensibles à l’oxydation, et plus il faut les protéger de l’air et de la lumière, même si on les associe à un anti-oxydant comme la vitamine E.
Dans un aliment industriel, la fabrication doit être ajustée (ajout au moins partiel des huiles en spray autour de la croquette), des anti-oxydants doivent être ajoutés pour protéger les acides gras, et après l’ouverture du sac, les propriétaires doivent être informés que l’oxydation est plus rapide. On ne recommande pas les grands sacs qui se consomment en plusieurs semaines voire plusieurs mois.
En plus de l’alimentation habituelle, apporter de l’huile de poisson peut se faire en toute sécurité par des gélules ou capsules, qui sont avalées ou ouvertes sur le repas au moment de le consommer (pas à l’avance), ou en flacon doseur dit airless (le flacon contient une poche où l’air n’entre quand l’huile en sort).
En bonne santé
La dose quotidienne chez l’adulte n’est pas très bien cernée.
On peut proposer des quantités (voir explication ci-dessous), mais il n’est pas possible en l’état actuel des connaissances d’assurer que cela améliore beaucoup la situation ou la santé de l’animal adulte.
Les recommandations NRC (National Research Council 2006) sont les suivantes :
- Chez le chien, apport d’EPA+DHA (en mg par kg de poids métabolique, poids porté à l’exposant 0,67)
- Pour le chiot (36*P0.75)
- Le chien adulte (30*P0.75)
- La chienne reproductrice adulte (60*P0.75)
- Chez le chat, il s’agit d’apport de DHA (en mg par kg de poids porté à l’exposant 0,67)
- Pour le chaton (2,5*P0.67)
- Chez le chat adulte (2,5*P0.67)
- La chatte reproductrice adulte (6,7*P0.67).
Sachant que la dose d’EPA peut être estimée en fonction de la composition classique des huiles de poisson (en général 60%EPA pour 40%DHA) dans ces huiles, alors les publications disponibles ont été faites en avançant la teneur en DHA.
Nous avons utilisé les données connues et la composition des huiles de poisson pour proposer des valeurs d’apport utilisables.
En cas de maladie
Cette question est encore peu connue ou mal cernée et l’efficacité est souvent dose-dépendante.
La dose efficace est bien supérieure à celle que l’on indique pour les situations physiologiques… Exemples…
Dans le cas d’insuffisance rénale chronique, chez le chat, l’apport de 1.97 g EPA /Mcal a montré une meilleure survie (Plantinga et al., 2005), venant conforter les travaux des années 90 de Brown et Finco chez le Chien et le Chat.
Lors d’arthrose, la dose chez le chien est d’au moins 0,38% d’acides éicosapentaénoïques. Chez le chat il est d’au moins 0,28% d’acides docohéxaénoïques (en % de la matière sèche de la ration totale) (règlement UE N°1070/2010).
Chez le chien cardiaque, l’apport utile, en particulier dans les cas d’arythmie du Boxer, mais aussi dans des troubles de la contractilité, va selon les études de 1 à 2 grammes d’Huile de Poisson à 1 à 4 grammes de EPA+DHA (Smith et al. J Vet Inter Med, 2007 ; Freeman, J Small Anim Pract, 2010 ; Billman et al., Am J Physiol Heart Circul, 2010).
On ne maîtrise pas encore la dose efficace à préconsier.
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